Dépression post-partum
Publié dans : Maternité et périnatalité
18 juin 2024
10 à 20 % des mères sont touchées par une dépression post-partum dans les semaines qui suivent l’accouchement. Elle apparaît après le 6e jour et pour être considérée comme liée au post-partum, elle doit se manifester avant la 6e semaine du post-partum.
Voici quelques éléments pour vous accompagner dans la prise en charge de vos patientes.
Ce trouble associe une tristesse intense et inexpliquée, une labilité émotionnelle, des troubles du sommeil, des croyances négatives avec un sentiment de culpabilité, une perte d’intérêt pour le nourrisson, une dépréciation de ses compétences maternelles, voire des idées suicidaires.
Ce qui doit alerter c’est l’intensité et la sévérité des manifestations.
Attention aux formes atypiques, la patiente pouvant se retrancher derrière le « j’ai tout pour être heureuse ».
Il faut rechercher la dépression du post-partum du fait du risque suicidaire élevé qui fait du suicide la 2e cause de mortalité du post-partum.
L’enquête nationale périnatale (ENP 2021) indique que parmi les femmes ayant accouché 2 mois plus tôt, environ 1 sur 20 a des idées suicidaires.
Les visites de suivi post-natal (sage-femme en centre de protection maternelle et infantile (PMI) ou en libéral, jusqu’au 12e jour du bébé), l’entretien post natal précoce (EPP), entre la 4e et la 8e semaine après l’accouchement), la consultation post-natale (6 à 8 semaines après l’accouchement) sont des moments privilégiés pour rechercher les facteurs de risque et les prémices de la dépression du post-partum.
Lire aussi l'article ameli.fr Suivi et accompagnement de la femme pendant la grossesse et après l’accouchement.
Des facteurs de risque de dépression du post-partum ont été identifiés
Des facteurs psychiatriques tels que :
- antécédents personnels de dépression du post-partum ;
- troubles de l’humeur ;
- antécédents psychiatriques personnels ou familiaux ;
- dépression ou anxiété pendant la grossesse ;
- psychotraumatisme lié à l’accouchement ;
- événements négatifs pendant la grossesse ;
- deuil périnatal.
Des facteurs socio-économiques tels que :
- conflits conjugaux ;
- isolement social ;
- précarité sociale.
Des facteurs obstétricaux tels que :
- grossesse non désirée ;
- primiparité ;
- antécédents obstétricaux : mort in utero, malformation fœtale, interruption de grossesse, accouchement prématuré, etc.
- grossesse pathologique ;
- morbidités néonatales ;
- âge maternel aux extrêmes des périodes de fertilité.
Échelles et questionnaires : Echelle EPDS (téléchargement EPDS.pdf) peut vous aider pour le diagnostic et /ou évaluer la sévérité de l’épisode dépressif.
Le risque suicidaire doit être évalué via les 3 axes suivants : Risques - Urgence - Dangerosité (RUD)
Facteurs de Risque | Individuels/ personnels |
les antécédents suicidaires personnels et familiaux |
santé mentale : diagnostic de trouble mental (troubles affectifs, troubles de la personnalité, psychose), abus ou dépendance à l’alcool ou aux drogues | ||
difficultés dans le développement : difficultés personnelles et sociales au cours de l’enfance et de l’adolescence | ||
estime de soi : faible ou fortement ébranlée | ||
tempérament et style cognitif : présence de comportements agressifs, impulsivité, rigidité de la pensée, difficultés à résoudre un problème et trouver des solutions | ||
santé physique : problèmes de santé physique qui affectent la qualité de vie | ||
familiaux : antécédents de violence ou abus subis (physique ou sexuel), pertes et abandons précoces, négligence des parents, toxicomanie et alcoolisme des parents, antécédents suicidaires dans la famille, santé mentale des parents | ||
Événements de vie : élément déclencheur : l’élément récent qui amène la personne en état de crise | situation économique : pauvreté économique | |
isolement social : le réseau social est inexistant ou pauvre | ||
séparation ou perte récente qui affecte encore le patient | ||
difficultés dans le développement : difficultés scolaires ou professionnelles, placement durant l’enfance/adolescence | ||
contagion suite à un suicide : la personne est affectée par un suicide récent | ||
difficultés avec la loi (infractions, délits) | ||
pertes, échecs ou événements humiliants | ||
Urgence | passage à l’acte imminent et planifié : dans les heures ou jours qui viennent : a pris des dispositions en vue d'un passage à l'acte, a communiqué intention à un tiers | |
scénario élaboré (comment, où) | ||
n'envisage pas d'alternative au suicide | ||
Danger | accessibilité du moyen létal envisagé | |
létalité élevé du moyen envisagé |
Il est possible en tant que professionnel de santé de contacter le 3114, le numéro national de prévention du suicide (24 h/24, 7j/7) pour un avis spécialisé. Les réponses sont assurées par des professionnels spécifiquement formés (infirmiers ou psychologues) et le Samu en cas de risque vital.
Maternité, périnatalité : tableau synthétique de l’approche thérapeutique en santé mentale
Télécharger ce tableau sous format PDF facilement imprimable en haute définition.
Les mesures hygiénodiététiques suivantes restent conseillées :
- préservation du sommeil ;
- implication du conjoint, de la conjointe ou d’un proche pour la gestion des nuits ;
- lutte contre isolement ;
- bon équilibre alimentaire ;
- maintien du zéro alcool en cas d’allaitement ;
- pratique régulière d’une activité physique adaptée.
La psychothérapie est recommandée, quelle que soit la sévérité de l’épisode dépressif caractérisé. Elle peut être la seule prise en charge dans les épisodes dépressifs caractérisés légers à modérés ou être associée à un médicament antidépresseur dans les formes plus graves de dépression.
Le dispositif Mon soutien psy, les séances d’accompagnement psychologique
Le dispositif Mon soutien psy permet à toute personne (dès 3 ans) angoissée, déprimée ou en souffrance psychique d’intensité légère à modérée, de bénéficier de séances d’accompagnement psychologique avec une prise en charge par l’Assurance Maladie. Il existe depuis 2022 et a évolué au 15 juin 2024.
En effet, les patients peuvent désormais prendre rendez-vous directement avec un psychologue conventionné avec l’Assurance Maladie et partenaire du dispositif Mon soutien psy. Ils peuvent également choisir de consulter d’abord un professionnel de santé dans le cadre de leur parcours de soin, avant de prendre rendez-vous avec un psychologue.
Par ailleurs, le nombre et le tarif des séances ont été augmentés. En accord avec le psychologue, au total 12 séances peuvent être prise en charge par l’Assurance maladie par année civile et par patient, au tarif unique de 50 €.
Consulter la liste des psychologues conventionnés.
Pour en savoir plus lire l’article « Accompagnement avec un psychologue conventionné : le dispositif Mon soutien psy ».
Le recours à des psychologues peut également se faire :
- en libéral sur ww.sante.fr ;
- au sein de centres médico-psychologiques (CMP) ;
- en PMI qui favorise le travail de préservation du lien mère-enfant.
La thérapie de soutien
Il s'agit d'une thérapie non codifiée dans sa technique, car non directive. Elle est basée sur l'empathie, la confiance, le soutien. Elle comprend une dimension de conseil, d'information et d'explications, permettant une compréhension partagée de la problématique du patient.
Une écoute active facilitant l'expression du patient peut en faire un outil thérapeutique à part entière vers un changement comportemental, affectif ou émotionnel.
Elle peut être réalisée par un médecin généraliste formé ou un psychiatre ou un psychologue clinicien, ou un psychothérapeute.
Il peut aussi exister des professionnels et des offres de soins près du domicile de votre patient, voir la rubrique « Près de chez vous » (en cours de construction) en bas de cet article.
Le recours au psychiatre peut devenir nécessaire en cas d’évolution péjorative ou en l’absence d’amélioration.
En libéral : consulter la liste des professionnels et des offres de soins proche du lieu de domicile de vos patients (lire le dernier paragraphe de l’article « Près de chez vous »).
Il existe aussi l’annuaire du site sante.fr qui permet de rechercher un psychiatre près du lieu de domicile du patient. Autre ressource possible à fournir à vos patients : la liste des centres médico-psychologiques (CMP).
Il peut aussi exister des professionnels et des offres de soins près du domicile de votre patient, voir la rubrique « Près de chez vous » (en cours de construction) en bas de cet article.
En fonction de la gravité de la dépression du post-partum, la préservation du lien mère enfant se fera :
- dans le cadre du suivi par une sage-femme (de la maternité ou libérale) ;
- au sein de la PMI ou du centre d'action médico-sociale précoce (CAMSP) ;
- dans le cadre d’une prise en charge par une infirmière de liaison du Réseau de psychiatrie périnatalité ;
- au sein d’unité d’hospitalisation dédiée : unité mère-enfant (UME), unité mère-bébé (UMB), unité d’accueils parents-bébés, équipes mobiles, en hospitalisation complète ou en hospitalisation à domicile (HAD) ou en hospitalisation de jour.
L’indication d’allaitement doit être abordée en fonction du rapport bénéfices/risques pour la mère comme pour l’enfant.
En cas d’allaitement
Les antidépresseurs associés à un passage faible dans le lait et des concentrations sanguines faibles ou indétectables chez les nourrissons allaités sont :
- pour les ISRS : paroxétine, sertraline ;
- pour les imipraminiques : clomipramine, amitriptyline, imipramine.
Pour aller plus loin, consulter les recommandations de bonnes pratiques de la HAS (à partir de la page 24).