Mémo : détection et suivi de l’insuffisance cardiaque

En France, 1,5 million de personnes souffrent d’insuffisance cardiaque (IC), avec 120 000 nouveaux cas chaque année. Un nombre en augmentation rapide (+ 25 % en 4 ans) du fait du vieillissement de la population.

Cette pathologie chronique et évolutive est mal connue par la population, y compris par les personnes diagnostiquées, qui ne relie pas les symptômes à ce trouble cardiaque. On estime que 400 000 à 700 000 personnes ne sont pas diagnostiquées. Cette errance diagnostique entraîne des hospitalisations évitables pour décompensation cardiaque, une dégradation de la qualité de vie pour ces patients - majoritairement âgés - et parfois leur décès. Du reste, l’insuffisance cardiaque est la cause de 70 000 décès par an (1).

Le rôle du médecin généraliste est central pour le repérage, la prise en charge de l’IC, l’adressage au bon moment du patient au cardiologue et le suivi posthospitalisation. La sécurisation de ces étapes clés du parcours de soins permet de prévenir son aggravation et de diminuer le risque d’hospitalisation.

Pour favoriser le diagnostic précoce et optimiser le suivi de l’IC, les 4 signaux d’alerte EPOF (Essoufflement, Prise de poids rapide, Œdèmes des membres inférieurs, Fatigue) doivent être surveillés car la présence d’un seul ou plusieurs d’entre eux, surtout après 60 ans, doit faire penser à l’insuffisance cardiaque ou à une aggravation de la maladie.

Les populations à risque d’insuffisance cardiaque sont aujourd’hui identifiées. Selon son étiologie, cette pathologie peut se manifester à un âge variable, et peut affecter des sujets jeunes. Sa prévalence s’accroît sensiblement à partir de 60 ans, atteignant progressivement des taux très significatifs (10 % chez les patients âgés de plus de 75 ans) et chez les patients fragiles ou atteints de comorbidités. Une grande proportion de patients porteurs d’une IC sont affectés par une maladie cardiovasculaire et près du tiers sont diabétiques.

Une approche populationnelle doit être privilégiée pour le diagnostic et le suivi de l’évolution de la maladie à travers la surveillance des signes EPOF.

Consulter les symptômes de l'insuffisance cardiaque, les signes de décompensation cardiaque et l'arbre décisionnel de diagnostic de l'insuffisance cardiaque (PDF).

Le repérage des signaux d’alerte de l’insuffisance cardiaque (EPOF) constitue l’un des principaux leviers d’actions pour une prise en charge optimale de la maladie. Une surveillance à mener chez l’ensemble des patients à risque, qu’ils soient diagnostiqués ou non, en sortie d’hospitalisation ou non, afin de favoriser un diagnostic précoce mais aussi de repérer les signes de décompensation de la maladie.

Tout l’enjeu est donc d’installer avec le patient un réflexe d’échanges autour des symptômes de l’insuffisance cardiaque lors de la consultation.

Questions à poser aux patients à risque

Pour faciliter ces échanges, voici quelques questions simples et accessibles à poser aux patients à risque.

Essoufflement inhabituel

  • Ressentez-vous parfois un essoufflement inhabituel ?
  • Avez-vous des difficultés à reprendre votre souffle après un simple effort, au repos ou en position allongée ?

Prise de poids rapide

  • Avez-vous remarqué avoir pris du poids de manière rapide ?
  • 2 à 3 kilos supplémentaires en quelques jours et sans explication ?

Pieds et chevilles gonflés (œdèmes)

  • Avez-vous la sensation d’avoir les pieds et les chevilles gonflés ?
  • La marque de l’élastique de vos chaussettes reste-t-elle visible une fois celles-ci retirées ?
  • Avez-vous des difficultés à mettre vos chaussures ?

Fatigue excessive

  • Avez-vous la sensation d’une fatigue importante lors de vos activités quotidiennes ?
  • Lorsque vous marchez ?
  • Montez les escaliers ?
  • Ou encore lorsque vous portez des charges ?

Aide à la prise en charge

Une fois le diagnostic de l’insuffisance cardiaque posé, le médecin généraliste pourra initier plusieurs actions dans le cadre du suivi de son patient :

  • initier / optimiser le traitement médicamenteux et prendre l’attache d’un médecin cardiologue pour un avis spécialisé et orientation du patient (conduite à tenir à adapter au constat d’éléments de sévérité clinique et biologique) ;
  • identifier les pathologies, comorbidités sous-jacentes et facteurs de décompensation de la maladie afin d’initier ou optimiser leur prise en charge ; s’assurer du statut vaccinal du patient (grippe, pneumocoque, SARS-CoV-2…) ;
  • organiser le plan de soins global et personnalisé en concertation avec le cardiologue, et en mobilisant si besoin un infirmier en soins généraux (IDE) ainsi que le pharmacien dans le cadre du bilan partagé de médication ;
  • mettre en place ou optimiser une surveillance coordonnée pluriprofessionnelle de l’évolution des symptômes pour déceler les signes annonciateurs d’une décompensation, en échangeant régulièrement avec le patient sur les 4 signes et symptômes EPOF.

Insuffisance cardiaque : Améliorer ensemble le dépistage de l’insuffisance cardiaque (interview croisée)

Dr Émilie Ferrat, médecin généraliste à Saint-Maur-des-Fossés et membre du Collège national des généralistes enseignants (CNGE) et Dr Pierre Sabouret, médecin cardiologue à Paris et président du Collège national des cardiologues français (CNCF)
 

Télécharger le mémo « détection et suivi de l’insuffisance cardiaque » (PDF).

(1) Livre blanc de l’insuffisance cardiaque, septembre 2021, Société française de cardiologie (SFC) - Groupe « Insuffisance cardiaque et cardiomyopathies » (GICC), 27 septembre 2021.

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