Les enquêteurs judiciaires de l’Assurance Maladie : de nouveaux acteurs de la lutte contre la fraude

  • Études

Les fraudes liées au numérique prennent de l’ampleur et représentent un défi majeur pour la préservation du système de santé. Des réseaux organisés détournent des ressources essentielles de la solidarité nationale, avec des mécanismes de fraude toujours plus sophistiqués. 

Les pratiques frauduleuses numériques se sont en effet diversifiées et professionnalisées : recrutement via les réseaux sociaux, usurpation d’identité, faux SMS et courriels, phishing, création de fausses sociétés, falsification de documents... Par exemple : des individus sont recrutés en ligne pour participer à des trafics de médicaments ou obtenir des remboursements frauduleux contre financement. Certaines bandes organisées vont encore plus loin et créent de toutes pièces des sociétés fictives de soins et facturent des prestations inexistantes.

De plus, la vente en ligne de documents falsifiés (ordonnances, arrêts maladie) s’est structurée, facilitant leur diffusion et leur usage abusif. Les montants détectés au titre des faux arrêts de travail s’élèvent ainsi à près de 30 millions d’euros en 2024 (contre 8 en 2023). En savoir plus sur la lutte contre la fraude aux arrêts de travail.

Une approche innovante pour des enquêtes de grande envergure

Face à ces menaces, l’Assurance Maladie a renforcé ses équipes avec une augmentation de 10 % des effectifs dédiés à la lutte contre les fraudes depuis 2023. Plus de 1 600 agents interviennent dans ce domaine d’action.

Parmi eux, 60 agents spécialisés (enquêteurs judiciaires, statisticiens, managers expérimentés) répartis dans 6 nouveaux pôles interrégionaux d’enquêteurs judiciaires (PIEJ). Ils sont dotés de compétences en investigation numérique et de prérogatives judiciaires. Ces pôles ont le droit d’enquêter sous pseudonyme, d’infiltrer des réseaux frauduleux et d’intervenir le plus en amont possible afin que les services de police ou gendarmerie neutralisent ensuite rapidement ces fraudeurs. Cette approche innovante s’appuie sur une collaboration étroite avec les forces de l’ordre et la justice pour mener des enquêtes de grande envergure et traiter les fraudes à fort enjeu, qui ont une dimension interrégionale ou nationale, qui sont organisées en bande ou qui utilisent un mode opératoire nouveau. Ces pôles interviennent aussi pour faire face à la fraude sur les réseaux sociaux et le dark web.

Présentation des enquêteurs judiciaires (description complète en cliquant sur le lien Lire la transcription)

Les enquêteurs judiciaires : de nouveaux experts pour muscler l'arsenal antifraudes

Les missions :

  • identifier les mécanismes de fraude et terrains d'escroqueries nouveaux
  • réaliser des actions judiciaires en lien avec les parquets :
    • des enquêtes sous pseudo sur les réseaux sociaux, le dark web ou les messageries cryptées
    • des auditions libres et des procès-verbaux
  • apporter leur expertise aux CPAM sur les dossiers complexes
  • renforcer la coopération avec les forces de l'ordre et la justice

Des agents aux profils variés :

  • agents de la lutte contre les fraudes à l'Assurance Maladie
  • agents expérimentées issus des forces de l'ordre
  • agents issus des autres branches de la Sécurité sociale

Les 4 types de fraudes à enjeu :

  • les fraudes à fort préjudice financier potentiel
  • les fraudes à dimension interrégionale ou nationale
  • les fraudes en bande organisée
  • les fraudes présentant un mode opératoire innovant

En vidéo : présentation des pôles interrégionaux d’enquêteurs judiciaires

[Cette vidéo de l’Assurance Maladie présente le rôle des cyber-enquêteurs chargés de traquer la fraude en ligne et de protéger le système de santé.]

Cyber enquêteur [au visage flouté] du Pôle Interrégional des enquêtes judiciaires : Nous sommes formés au cyber espace. L'idée est d'aller traquer les fraudeurs là où ils ne s'y attendent pas, notamment sur les réseaux sociaux.


[Décryptage – Les cyber enquêteurs de l’Assurance Maladie : Une nouvelle force de frappe contre les fraudes en ligne]

Marc Scholler, directeur financier de l’Assurance Maladie : La fraude en ligne connaît une explosion ces dernières années, facilitée par l'essor des nouvelles technologies. On assiste, notamment sur certains sites internet, à des ventes de faux arrêts de travail ou de fausses ordonnances qui permettent de se procurer des médicaments dans des conditions complètement illégales. 
Les réseaux sociaux comme Snapchat ou Telegram permettent ensuite de les écouler discrètement et dans un relatif sentiment d'anonymat. 
Ces fraudes ont des conséquences graves, des conséquences financières pour l'Assurance Maladie puisqu'elles causent un préjudice. Mais elles peuvent aussi avoir des conséquences sanitaires puisque, parfois, des assurés qui profitent de ces trafics vont consommer des produits comme des médicaments dans des conditions qui ne sont pas celles dans lesquelles ils doivent l'être. 
C'est pour cela que nous déployons actuellement des cellules de cyber enquêteurs. Ce sont des agents qui vont pouvoir intervenir en dans l'espace numérique, notamment sur les réseaux sociaux sous de fausses identités pour pouvoir débusquer ces fraudeurs et ces trafiquants en lien avec les forces de l'ordre.
Pour pouvoir le faire, nous avons été dotés de nouveaux pouvoirs qui sont des pouvoirs judiciaires renforcés.
Concrètement, nous sommes actuellement en cours de déploiement de six centres de cyber-enquête à travers l'Hexagone qui sont dénommés PIEJ, Pôles interrégionaux d'enquêteurs judiciaires avec un pôle au niveau national, au niveau de la Cnam. Ce sont 60 agents, à la fois des agents assermentés, accompagnés de statisticiens, qui vont pouvoir intervenir spécifiquement sur ces fraudes et qui seront opérationnels à 100 % au cours de l'année 2025. Ils vont accompagner la force de frappe dont nous disposons déjà actuellement, qui est une force de frappe composée de plus de 1 600 agents qui luttent quotidiennement pour protéger le système de santé.

Cyber enquêteur [au visage flouté] du Pôle Interrégional des enquêtes judiciaires : Après 22 ans passés au sein de la Gendarmerie nationale, en octobre 2024, j'ai intégré le Pôle interrégional des enquêteurs judiciaires au sein de l'Assurance Maladie. Au sein de ce pôle, un agent sur deux est ancien gendarme ou policier.
Nous sommes formés au cyber espace. L'idée, c'est d'aller traquer les fraudeurs là où ils n’y attendent pas, notamment sur les réseaux sociaux.
J'ai postulé à ce poste pour deux raisons. La première, l'investigation. Ce sentiment de tirer la petite ficelle et avoir un résultat satisfaisant au bout. Et la deuxième raison, c'est le défi, le challenge. J'ai bien compris que ce pôle était tout nouveau au sein de l'Assurance Maladie, donc c'est pour ça que j'ai postulé. J'ai voulu contribuer et apporter mes compétences.
Le fait d'aller chercher les fraudeurs sur Internet, on va avoir un temps d'avance sur eux et ça va nous permettre de résoudre les enquêtes plus rapidement et de limiter la fraude.
Cette notion de rapidité, elle est présente aussi avec les services de police et de gendarmerie. Je rajouterai aussi les tribunaux, les parquets. On a nos contacts, on a nos réseaux, et donc on va pouvoir aller plus vite avec ses partenaires et notamment résoudre les enquêtes plus rapidement.
Toute personne impliquée dans ce trafic, que ce soit acheteur, vendeur ou tête de réseau, encourt 10 ans d'emprisonnement et 1 million d'euros d'amende.
Le pôle d'enquêteur judiciaire permet à l'Assurance Maladie de combattre les fraudes avec une nouvelle corde à son arc. Pour conclure, la création de ce pôle va permettre de frapper plus fort et plus vite les fraudeurs.

Lutte contre les fraudes en 2024 : davantage d’escroqueries stoppées avant un préjudice financier

En 2024, grâce à une stratégie toujours plus efficace, l’Assurance Maladie a détecté et stoppé un montant de fraudes de 628 millions d’euros : un montant record, en hausse de près de 35 % par rapport à 2023.
En savoir plus sur la lutte contre les fraudes : les actions menées par l’Assurance Maladie et les chiffres clés de 2024.